Fred, “Un instituteur laïque sous la Troisième République”
EAN13
9782366821536
Éditeur
Éditions Gunten
Date de publication
Langue
français
Fiches UNIMARC
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Fred

“Un instituteur laïque sous la Troisième République”

Éditions Gunten

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On ouvre ce roman comme une porte derrière laquelle on sait que l’on va
découvrir quelque chose de bien sinon de bienfaisant car déjà une musique nous
parvient aux oreilles. Un ton d’autrefois vient se mesurer à celui
d’aujourd’hui sans aucune honte ni discordance. Puis on fait la connaissance
de Fred, héros de ce roman, élève de l’École normale laïque d’instituteurs de
Lons-le-Saulnier, sous la Troisième République. Avec lui, nous franchissons le
seuil d’écoles dans lesquelles l’aspect éducatif revêtait un aspect religieux
et militaire et où « labeur et vertu sont prônée » aux dépens de valeurs et
d’enseignements réels. Fred, esprit talentueux et libre va se battre de toute
sa jeunesse contre les pouvoirs oppressants de ceux qui les détiennent et
dirigent. Il ne peut se contenter d’être une petite lampe dans la rue du
village, il veut aussi écrire et « peupler des déserts », les siens en
l’occurrence. Il subit des tempêtes dévastatrices apportées par le souffle
d’un romantisme incorrigible et ravageur, qui, dépourvu de toute mièvrerie,
lui fait vivre de vrais tourments, amoureux et professionnels. Il nous
provoque le même plaisir que celui ressenti par Jean-Paul Colin à renouer ce
fil familial et (re)connaître ce grand-oncle, excellent écrivain, Victor-
Eugène Magdelaine qui, comme nul autre, escalade le temps avec l’agilité d’un
chat, les toits. Et ne jamais oublier qu’« un nouveau livre est toujours une
nouvelle lumière ! »

Ils étaient là, de trente-cinq à quarante, dans une salle étroite et longue,
aux murs peints en vert et qui, malgré la lumière qu’elle recevait en
abondance, avait un aspect sévère et triste. Ils étaient là, de trente-cinq à
quarante jeunes gens, qui aspiraient à l’École normale.

Courbés sur de vieux pupitres en chêne que le temps et l’usage avaient
mordorés, on ne voyait que leurs dos et le dessus de leurs têtes : têtes aux
chevelures de nuances variées ; dos puissants ou malingres. Et dans le silence
on entendait le crissement des plumes, le frottement des semelles ferrées sur
le parquet, des toux nerveuses, des soupirs de contentement ou de désespoir.
Ils commentaient la parole de Vauvenargues : « Les grandes pensées viennent du
cœur ». Ils écrivaient, biffaient, ajoutaient, et les phrases se suivaient,
boiteuses, incohérentes, insignifiantes, énigmatiques ; mais ce débordement de
phrases, cette multitude de mots allaient, couraient vers l’horizon brumeux et
lointain où était écrit : « Les grandes pensées viennent du cœur ».

Assis au bureau, M. Rachel, professeur surveillant, lisait. Tandis que sa main
gauche tournait les feuilles, sa dextre tortillait une barbe noire
correctement taillée. Fred avait remarqué qu’il portait une bague où rutilait
un diamant, et son admiration déjà fort excitée n’eut plus de bornes lorsque,
M. Rachel circulant dans la salle, il constata qu’il laissait après lui des
effluves discrets d’héliotrope.

*[XIXe]: 19e siècle
*[29 janvier]: selon le calendrier julien
*[6e]: Sixième
*[26 mai]: selon le calendrier julien
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